La mort du héros dans la littérature française

Tombeau pour un héros éternel 

 

Un sujet comme "la mort du Héros dans la littérature française du Moyen-Age à nos jours" n'a pas besoin d'être justifié : il s'impose comme une évidence, et même comme une obsession. Une multitude d'œuvres littéraires mettent en mots, mettent en discours la mort du héros ; c'est souvent le sommet de l'œuvre, la scène capitale, voire "la scène à faire".

 

Un des enseignements de ce colloque aura été précisement que, à travers toutes les époques, on a assisté à la contestation du héros. La formule de Paul Bénichou, "la démolition du héros", est applicable mutatis mutandis à toutes les étapes de notre histoire littéraire. Et pourtant, on continue sans cesse de parler du héros et de sa mort. Mais cette chronique d'une mort annoncée est en réalité l'histoire du Phénix. Ou, plus subtilement, l'annonce de la mort est la condition même de l'héroïsme : c'est parfois leur mort qui fait de l'homme banal ou de la femme ordinaire un héros ou une héroïne. On ne peut imaginer Phèdre vivante à la fin de la tragédie racinienne comme on ne peut imaginer Suréna en vie à la fin de la tragédie cornélienne.

Et cela nous apprend quelque chose d'essentiel : le héros est l'homme (ou la femme) qui refuse les compromis ; il est celui (ou celle) qui dit non jusqu'au bout, jusqu'à la mort. Le héros n'est pas tant le vainqueur que le sauveur : il est celui qui sauve l'honneur de l'humanité. Grâce à lui, l'humanité échappe aux compromissions médiocres, aux conventions mesquines, aux arrangements faciles. La mort du héros écrit ainsi la dignité de l'homme.

Jean Pierre Landry


Retour à la table du volume